Je répond sur le temps de réverbération dans ce sujet, mais ça pourrait être déplacé dans un autre.
Je vais présenté plusieurs point de vue qui révèlent selon moi plusieurs aspects du problème :
Le point de vue de la norme par Jean-Pierre Lafont :
C'était sur HCFR si j'ai bonne mémoire :
La réverbération appartient à la pièce, pas aux enceintes. On ne peut pas la mesurer avec des enceintes (hifi ou cinéma) à cause de la directivité. Il faut impérativement une sphère pulsante omnidirectionnelle.
On ne peut pas la mesurer avec un seul micro, sauf s'il est monté sur une perche rotative. Il faut au moins 4 micros multiplexés, ou de préférence 8.
La pièce doit être très silencieuse, sinon, on mesure du bruit.
Les micros et les préamplis doivent être très silencieux pour les mêmes raisons. On ne peut pas mesurer la réverb avec un micro à électret, genre Berhinger ou équivalent.
Je n'utilise pas la réponse impulsionnelle pour mesurer la réverbération. Il existe des logiciels spécialisés (mais pas gratuits).
On mesure au 1/6 d'octave à par de la fréquence de Schroeder (200 à 250Hz) et 1/12e minimum ou 1/24e ou davantage en dessous de cette fréquence.
Elles sont décrites dans la norme ISO 3382
Déjà avec la sphère (dodécaèdre), c'est pas simple: il faut la placer à plus de 2m d'un mur, il faut mesurer à 10 emplacements minimum, puis déplacer la sphère à un autre endroit, re-mesurer 10 fois, et ainsi de suite. ça fait une centaine de mesures au total dont il faut extraire la moyenne pour chaque octave.
Il faut produire un bruit 45dB au dessus du bruit ambiant si on veut mesurer le RT30 et 75dB si on veut mesurer le RT60.
Le signal est un bruit rose filtré de 100Hz à 5kHz (soit un spectre de 88Hz à 5657Hz).
En prenant ces précautions, on arrive à une précision de +/-5% si on a de la chance.
Une chose surprend à la lecture de cette méthode ISO. Si le champs réverbéré est homogène, pourquoi autant de mesures ?
Le point de vue théorique :
Le temps de réverbération dépend de l'absorption des matériaux. À chaque réflexion dans la pièce, l'énergie est diminuée d'un facteur (1-alpha) avec alpha le coefficient moyen d'absorption. À partir de cette formule, on peut calculer le nombre de réflexions nécessaires pour atténuer le son de 60 dB.
Pour en déduire le temps de réverbération, il faut connaitre le temps que met le son entre deux réflexions. C'est un temps moyen qu'on appelle le libre parcours moyen et dont la valeur vaut 4V/S avec V le volume de la salle et S la surface de tous les murs, plancher et plafond.
Si l'on prend l'exemple de ma salle, j'ai un volume V de 122 m³ et une surface S de 163 m². Le libre parcours moyen est donc de 3 m.
Avec un temps de réverbération de 100 ms, avec une vitesse de 344 m/s le son parcourt pendant la durée de réverbération 344*0.1 = 34 mêtre ce qui correspond à
11 réflexions avec un parcours moyen de 3m.
Le point de vue de Philip Newell :
Voici ce qu'écrit Phillip Newell dans son livre "Recording Studio Design" :
La réverbération est un concept souvent mal compris, du moins en ce qui concerne sa pertinence pour les pièces de la taille de la plupart des studios d'enregistrement.
La réverbération nécessite un champ diffus et ne peut généralement exister que dans les pièces où les matériaux réfléchissants sont répartis de manière plus ou moins uniforme sur toutes les surfaces.
Malheureusement, même dans certains milieux professionnels, le terme « temps de réverbération » est souvent utilisé pour désigner la vitesse de décroissance des sons dans une pièce qu'il peut engendrer une confusion considérable.
Or, parler d'un « temps de réverbération de 200 millisecondes » est contradictoire, car si le son s'atténue de 60 dB en seulement un cinquième de seconde, il n'a jamais le temps de satisfaire aux conditions de champ diffus nécessaires au développement de la réverbération.
Le point de vue de Francis Brooke :
Voici ce qu'écrit Francis Brooke sur son site :
Dans le contexte de la mesure d'une salle home-cinéma, dans quelle mesure la norme ISO 3382 est-elle applicable ?
De mon point de vue, deux raisons justifient dans ce contexte d'être "hors norme" en ce qui concerne le chapitre mesure.
1. Ce qui est important, c'est le temps de réverbération perçu au point d'écoute. et non un calcul basé sur la moyenne de plusieurs mesures dans la pièce.
2. Ce sont les enceintes qui vont exciter les modes de la pièce. Il est donc légitime d'utiliser les enceintes comme source sonore plutôt qu'un ballon ou un dodécaèdre.
Le point de vue des mesures :
Voici l'exemple de deux mesures dans ma salle, avant et après le traitement acoustique.
J'ai utilisé pour ces mesures un dodécaèdre avec la méthode classique (résumée Jean-Pierre Lafont). Je place le dodécaèdre en deux endroits différents. Je quadrille la pièce en faisant 4 mesures par largeur et 3 le long de la pièce avec 2 hauteurs pour chaque mesure. Ça me donne au total 48 mesures.
Avant le traitement acoustique,, voici le tracé de toutes les mesures qui comprends les 4 calculs de REW, EDT, T20,T30 et Topt. On se concentrera plus particulièrement sur le T20, T30 et Topt :
On constate la dispersion des mesures Voici maintenant, la moyenne de toutes ces mesures :
Les 4 mesures sont cohérentes avec des résultats très proches, notamment T20,T30 et Topt.
Pour vérifier l'homogénéité des mesures, on peut restreindre les mesures à un sous-ensemble et vérifier si la moyenne avec ce jeu restreint est identique avec le jeu complet. Dans ma salle non traitée, c'est bien le cas. Je ne montre qu'un calcul dans lequel l'on ne fait que la moyenne par source (2 sources). Les moyennes sont identiques :
Voyons maintenant les mesures réalisées dans ma salle traitée et considérons tout de suite les moyennes obtenues par ligne. Il y a 3 lignes. Deux lignes sont placées devant l'auditeur (vert et bleu) et la troisième juste derrière lui (rouge) :
On constate dans ce cas que la courbe rouge donne un temps supérieur aux deux autres, aussi bien pour le T20, T30 et Topt avec environ 250 ms à partir de 800 hz contre 200 ms pour les autres. L'écart n'est pas négligeable : 25% de plus.
Cette différence s'entend nettement quand on parle dans ma pièce et qu'on se situe devant les enceintes (zone très absorbante) ou au PE. Cela s'explique par une absence de traitement acoustique au niveau du PE légèrement en arrière de celui-ci avec des diffuseurs de Schroëder.
Examinons maintenant le temps de réverbération mesuré au PE avec les enceintes utilisées pour l'écoute (enceinte directive donc). Je redonne cette courbe. Voici ce qu'on obtient :
Cette fois le temps de réverbération est de 100 ms soit 2,5 fois plus faible que celui mesuré au PE avec le dodécaèdre.
Conclusion :
Quel est le temps de réverbération de ma salle ? Il n'y a pas une valeur unique.
Le temps de réverbération dans des pièces fortement traitées qui conduisent à un faible nombre de réflexions (
11 chez moi pour 100 ms) n'a pas vraiment de sens, comme le précise Newell. Le concept de temps de réverbération, qui sous-entend une valeur homogène pour la salle, n'est pas valide. De plus, ce temps varie lorsque la salle comporte des traitements polarisés et non uniformément répartis dans la salle.
Dans la mesure où le critère qui importe est la DC, on peut se demander finalement de l'intérêt de la mesure du temps de réverbération avec un dodécaèdre et la moyenne de plusieurs points.
Je rejoins donc la position de Francis Brooke : ce qui compte, c'est la mesure au PE avec les enceintes, car c'est cette mesure qui détermine la distance critique.
Pour en discuter ... (dirait Francis)